![]() S a a r b r ü c k e r B i b l i o t h e k (http://www.jura.uni-sb.de/projekte/Bibliothek) |
Cet article est extrait de "L'identité de la person humaine -
Etude de droit français et de droit comparé", ouvrage publié sous la direction de Jacquline Pousson-Petit aux éditions Brulant (Bruxelles - 2002) auquel nous conseillons le lecteur de se reporter - ISBN 2-8027-1601-08 |
La situation juridique
du transsexuel
en
République
Fédérale
d’Allemagne[*]
par
Françoise
FURKEL
Chargée
de conférences au Centre juridique
franco-allemand
de
l’Université
de la Sarre
Professeur
invitée à la
Faculté de Droit de Nancy
Si la fascination
qu’exerce
généralement
le syndrome de « transsexualisme
» n’est pas
récente,
c’est essentiellement depuis les
années cinquante que ce concept, en Allemagne,
s’est vu peu
à peu
distingué des
états
d’intersexualité
marqués par des anomalies
génétiques
et des déviations
sexuelles[1].
Enfin
considéré
comme un trouble de
l’identité[2]
qui confère
à
l’intéressé
la conviction constante d’appartenir au sexe
opposé et le besoin
obsédant de changer
d’état sexuel, le transsexualisme est
reconnu par le corps médical allemand depuis
une trentaine
d’années et
les traitements qui l’accompagnent, dont la
licéité
n’est plus douteuse, sont
généralement
remboursés par les caisses
d’assurance-maladie[3].
Mais, nul ne l’ignore, le transsexuel ne peut
se satisfaire d’une
« métamorphose
»[4] physique ;
il aspire à la modification de son
état civil qui, seule, lui donnera un statut
social conforme au sexe dont il a pris
l’apparence.
Si, en
l’absence de loi, des
règles jurisprudentielles ont
été
élaborées
dans de nombreux Etats pour tenter de régler
les problèmes
posés par le
phénomène
transsexuel, l’Allemagne
s’est
distinguée
très
tôt[5]
par une intervention législative en la
matière, intervention fort originale de
surcroît. Dès
1980 en effet, le législateur, dans une
« loi sur les transsexuels
» (Transsexuellengesetz
Ä
TSG[6]),
s’est emparé
de ce problème dit de
« haute
marginalité »
et a tenté, en prenant en compte le sexe
psychosocial du transsexuel, de lui venir en aide sans transgresser
l’ordre social.
C’est,
une fois encore, la Cour constitutionnelle
fédérale
qui, indirectement, provoqua l’intervention du
législateur. On
connaît
l’influence exceptionnelle
exercée sur le droit
privé, en Allemagne, par la Loi
fondamentale[7]. Que
ce soit en matière de nom ou de droit de
l’enfance[8],
lorsque les juges suprêmes concluent
à la violation des droits fondamentaux, il est
rare que le législateur ne finisse pas par
intervenir, même
s’il n’en est
pas prié
directement[9].
Lorsque les
premières
opérations de conversion sexuelle
commencèrent
à se pratiquer en
Allemagne1[0],
un refus catégorique de changement
d’état1[1]
fut d’abord, sauf exception,
opposé aux
demandeurs1[2].
Or l’un de ceux-ci,
débouté par
la Cour
fédérale de
justice1[3]
sur le fondement de
l’immutabilité
de l’état, forma un recours devant la
Cour constitutionnelle
fédérale ;
il invoqua notamment l’article 1,
alinéa 1 de la Loi fondamentale aux termes
duquel la dignité de
l’être humain est intangible, et
l’article 2,
alinéa 1 de cette
même loi qui
prévoit le droit de chacun au libre
épanouissement de sa
personnalité, pourvu que ni les droits
d’autrui ni
l’ordre constitutionnel ou la loi morale ne
soient
violés1[4].
La Cour constitutionnelle conclut à la
violation par la décision litigieuse des deux
droits fondamentaux
invoqués1[5].
Pour les juges suprêmes, ces droits imposent le
changement d’état du transsexuel qui a
acquis, de par les interventions subies, la morphologie du sexe
revendiqué. Plusieurs demandes furent, par la
suite, reçues par les juridictions ordinaires,
mais le nouveau laxisme de la jurisprudence en la
matière pesa
assurément lourd dans
l’intervention, en 1980, du
législateur visant entre autres
à mettre obstacle
à certains
excès1[6].
Cette intervention, notons-le, fut également
sans doute
précipitée
par le rapport, en 1979, de la Commission
européenne des droits de
l’Homme dans
l’affaire VAN
OOSTERWIJCK1[7].
Même si, pour des raisons de
procédure, cette affaire ne fut pas
jugée au fond par la Cour
européenne, la condamnation de
l’Etat belge par la Commission
révéla aux
autorités allemandes
l’urgence
d’une solution susceptible de
régler le
problème du
transsexualisme1[8],
et un projet de loi fut rapidement
déposé.
Au nom de la Loi fondamentale, les auteurs
de ce projet entendaient prendre en compte le sentiment
irrésistible du transsexuel
d’appartenir au sexe
opposé et tenter de
remédier, dans la mesure du possible,
à sa quasi
Ä
impossibilité de
vivre1[9].
Mais si l’objectif
à atteindre
n’était pas
discuté, ces auteurs
s’opposèrent
souvent à propos de la conception
même du texte. Etait-il
préférable
d’établir un
système unitaire conduisant toujours
à la modification de la mention du sexe, ou un
système dualiste capable de venir plus
largement en aide à tout individu
s’identifiant au sexe
opposé ? Ce fut le
système dualiste qui
prévalut, un
système «
à la carte »
en quelque sorte, prévoyant
à
côté
d’une solution dite
« lourde » une
formule plus «
légère
», susceptible de
s’appliquer à
tous ceux qui ne peuvent ou ne veulent changer juridiquement de
sexe.
A
Ä
La « formule lourde
» ou la modification de la mention
du sexe
A priori, cette solution offerte au
transsexuel aux § 8 et suivants de la loi du 10
septembre 1980 est la seule qui semble de nature
à donner à
celui-ci la consécration sociale
à laquelle il aspire. Mais les conditions
exigées, multiples, sont strictes et la porte
pour parvenir à la mise en harmonie du sexe
juridique et du sexe psychologique est étroite
! Les effets d’une telle transformation, il est
vrai Ä
en matière de mariage notamment
Ä sont
de nature à motiver le transsexuel et
justifier ses efforts dans sa réassignation
hormonale et chirurgicale du sexe qui, parfois, dure de longues
années.
1) Les conditions
posées au changement juridique
de sexe
L’intéressé,
qui doit être soit de
nationalité allemande, soit apatride ou
réfugié,
doit avoir la conviction d’appartenir au sexe
opposé à
celui mentionné dans son acte de naissance et
le désir
irrésistible, depuis au moins trois ans, de
vivre conformément
à cette conviction
(§ 1, al. 1, Transsexuellengesetz -
TSG). Ce sentiment d’appartenance
à l’autre
sexe doit apparaître, en outre,
« selon toutes
probabilités »
comme irréversible
(§ 1, al. 1,
n 2 TSG). Deux experts
spécialisés
en matière de transsexualisme,
indépendants
l’un de
l’autre, se voient obligatoirement confier, au
demeurant, une mission déterminante : dans un
rapport qu’ils remettront au juge, ils devront
en effet, compte tenu des connaissances actuelles de la science
médicale,
évaluer la vraisemblance de cette
irréversibilité.
Si le législateur avait
prévu, en outre, un
âge minimum de vingt-cinq ans
(§ 1, al. 1,
n 3 TSG) pour demander un
changement juridique de sexe, la Cour constitutionnelle
fédérale,
dès 1982, avait
déclaré
caduque cette limite
d’âge2[0].
Quelques
auteurs2[1],
à
l’époque, ont
déploré
cette décision, redoutant parfois chez le
sujet jeune une précipitation
dangereuse2[2].
Mais
l’expérience
a prouvé
qu’en raison de la
complexité des
opérations de conversion sexuelle et des
conditions très
sévères
posées à
celles-ci par la Chambre des médecins, les
excès
n’étaient pas
à redouter.
Avant
d’obtenir la modification de la mention du sexe
sur son acte de naissance,
l’intéressé
doit en effet s’être soumis
à une intervention chirurgicale qui,
« ayant
modifié ses organes
génitaux externes, lui a
donné une apparence voisine de
celle de l’autre sexe
» (§ 8, al. 1,
n 4 TSG). La formule
employée par le
législateur
n’étant
guère explicite, on
s’est
interrogé, outre-Rhin, sur la
nécessité de
telle ou telle mutilation. Très vite, un
consensus s’est
établi ; à
côté du
traitement hormonal classique, les magistrats exigent, pour prendre en
considération la demande, une transformation
des organes génitaux en vagin chez le
transsexuel homme/femme et chez le transsexuel femme/homme une mammectomie et
une
hystérectomie2[3].
Le demandeur au changement juridique de
sexe doit être, en outre,
définitivement inapte
à la
procréation (§
8, al. 1, n 3 TSG). Les
deux experts appelés
à se prononcer sur la conviction
irréversible du transsexuel
d’appartenir
à l’autre
sexe2[4]
sont chargés, en outre, de prendre position
sur la
réalité de
la «
métamorphose »
physique de
l’intéressé
et sur sa
stérilité
définitive. Cette intervention obligatoire des
experts, en l’occurrence, doit
être
soulignée. Elle permet
d’éviter que les juges
s’érigent en scientifiques, et elle
arrache ainsi le demandeur à
l’arbitraire trop souvent de mise en la
matière.
Un autre point
mérite sans doute
qu’on s’y
arrête quelques instants. On a souvent
déploré,
outre-Rhin, le silence du législateur relatif
à la prise en charge des traitements de
conversion sexuelle. Si, depuis un arrêt de
1987 de la Cour
fédérale du
contentieux
social2[5],
les caisses publiques remboursent ces traitements dans leur
intégralité,
ce n’est que depuis 1995 que les caisses
privées ont
été
contraintes par la Cour
fédérale de
justice2[6]
d’en faire de
même, le transsexualisme
étant
désormais
assimilé à
une maladie. Il semble même
qu’actuellement ces caisses se satisfassent des
rapports des experts pour procéder aux
remboursements.
La
dernière condition
exigée est celle qui provoqua la plus vive
controverse : le requérant doit
être
célibataire (§
8, al. 1, n 2 TSG). Cette
exigence implique la
nécessité,
s’il est
marié, de mettre fin
à son mariage avant sa demande au tribunal. Le
projet initial, qui ne faisait pas du célibat
une condition à
l’obtention du changement de sexe mais
prévoyait une dissolution automatique du
mariage au moment du prononcé de la
décision autorisant un tel changement, avait
été
jugé
inconstitutionnel2[7].
On avait fait valoir en effet l’absence de
toute condition susceptible de traduire
l’échec du mariage
(Zerrütung),
nécessaire à
l’obtention du
divorce2[8].
En outre, aux termes de l’article 6, al. 1 de
la Loi fondamentale, « le mariage et la
famille étant
placés sous la protection
particulière de
l’Etat
», il apparaissait contraire
à ce texte de dissoudre automatiquement un
mariage qui ne pouvait être
considéré
comme véritablement
« ruiné
». Il semble que la solution finalement retenue,
celle du divorce classique, ne l’ait
été que pour
sortir d’une impasse, mais elle ne satisfait
guère ! Le fait de contraindre le demandeur
à divorcer afin de pouvoir obtenir son
changement de sexe représente en effet une
atteinte à
l’égalité
de même qu’une
ingérence dans la vie
privée à
laquelle le citoyen allemand est peu
habitué.
Dans le cadre de ce
véritable «
parcours du combattant »
imposé à
celui-ci, une règle de
procédure originale doit
être
signalée. Un grand danger, en effet, aurait pu
menacer le transsexuel. Les conditions
imposées par la loi sont multiples et si elles
sont très claires sur
l’exigence de
célibat et de
stérilité,
elles manquent quelque peu de précision sur
les opérations de conversion sexuelle
elles-mêmes.
C’est la
jurisprudence2[9],
rappelons-le, qui progressivement a mis fin aux
hésitations auxquelles la formule lapidaire du
législateur avait pu donner lieu.
Néanmoins, le juge saisi, titulaire
d’un pouvoir
d’appréciation,
peut toujours se refuser à
considérer
l’intéressé
comme « appartenant
à l’autre
sexe » (§ 8, al.
1 TSG). Il était concevable alors
qu’un transsexuel
s’étant soumis
à
différentes
opérations chirurgicales lourdes,
s’étant rendu inapte
à la
procréation et ayant mis fin
à un mariage
qu’il aurait
peut-être
souhaité maintenir, voie sa demande
repoussée ! Aussi, pour pallier ce risque, le
législateur donne-t-il au transsexuel la
possibilité
d’obtenir du juge, dans un jugement
intermédiaire (Vorabentscheidung) ayant
force de chose jugée,
l’assurance de voir
modifié son sexe juridique une fois remplie
telle ou telle condition faisant aujourd’hui
défaut (§ 9,
al. 1 TSG). Cette règle, tout
à fait exemplaire, permet incontestablement au
transsexuel de vivre moins mal cette longue et douloureuse
période de
réassignation du
sexe3[0].
Hormis
l’obligation faite au transsexuel de mettre fin
par le divorce à son
éventuel mariage, les conditions
posées à la
demande de changement juridique de sexe semblent satisfaisantes. Portant
à la fois sur les modifications de
l’apparence morphologique du demandeur et sur
son état civil, elles mettent obstacle aux
excès qu’une
législation plus floue
Ä ou
une décision de principe
incomplète
Ä
permet de redouter. L’exemple
donné par
l’Allemagne
elle-même, avant
l’intervention
législative mais
après
l’arrêt de la
Cour constitutionnelle
fédérale de
19783[1]
imposant le changement juridique de sexe en cas de transsexualisme
véritable, est significatif. La Cour
s’étant
montrée fort peu prolixe dans cet
arrêt sur les conditions
nécessaires au changement
d’état, de nombreuses demandes furent
reçues pendant deux ans par une jurisprudence
scandaleusement laxiste bien souvent. On citera, entre autres, cet
arrêt fameux qui accueillit en avril
19803[2]
la demande en modification de la mention du sexe
d’un homme
marié, consacrant ainsi
l’union conjugale entre deux femmes ! On
mentionnera aussi l’existence
d’autres
décisions qui permirent la modification de
l’état civil du transsexuel
malgré
l’absence de toute intervention chirurgicale ou
de toute preuve de
stérilité3[3].
Si de tels
dérapages touchant aux conditions du
changement juridique de sexe sont désormais
exclus, il en va de même, depuis la loi du 10
sept.
19803[4],
des effets engendrés par ce
changement.
2) Le changement de sexe
à
l’état civil et ses
conséquences
La modification de la mention du sexe
à
l’état civil,
même si « elle
n’est jamais
qu’un
trompe-l’oeil3[5]
», apparaît
dans la loi allemande comme
l’achèvement
de la transformation du transsexuel lorsqu’il
réunit toutes les conditions
exigées. Normalisation sur le plan juridique,
le changement juridique de sexe entraîne des
conséquences logiques. Tout
d’abord, lorsque devient
définitive la
décision ordonnant le changement
d’état, le demandeur
bénéficie
d’une modification de ses
prénoms (§ 8,
al. 2 TSG); il adopte alors ceux mentionnés
dans sa demande, à moins
qu’il n’ait
fait usage auparavant de la « formule
légère
» qui lui est
également
proposée. Ses droits et devoirs sont alors
fixés en fonction de son nouveau sexe, sauf
disposition contraire de la loi (§ 10, al. 1
TSG3[6]).
Ce principe clair engendre notamment pour
le transsexuel la possibilité
d’épouser une personne du sexe
opposé au sien
à
l’état civil. Cette
conséquence du changement
d’état
revêt une importance majeure pour
l’intéressé
qui, le plus souvent, aspire à se marier. Bien
qu’elle ne figure pas explicitement dans la
loi, cette possibilité de mariage du
transsexuel n’a jamais
été mise en
question ni par la doctrine ni par la
jurisprudence3[7].
Certaines précisions ont simplement
été
apportées par les tribunaux.
C’est ainsi notamment que,
l’obligation
d’information du futur conjoint
n’étant pas
prévue
spécifiquement dans la loi, les
règles de droit commun ont
été
jugées applicables. Ainsi, au cas
d’une dissimulation de son
passé, le transsexuel pourra voir son mariage
dissous par le divorce ou annulé pour
manœuvres dolosives ayant
engendré une erreur substantielle et
déterminante
(§ 1314, al. 2,
n 3 nouveau
BGB3[8]).
Le fait pour l’un des
époux de garder le silence sur certains points
qui peuvent se
révéler
essentiels dans le cadre de la vie commune
Ä comme
l’existence de pulsions sexuelles anormales
Ä a
toujours été
considéré
comme susceptible
d’entraîner la
nullité de
l’union3[9].
Cette nullité (Eheaufhebung) devra
être demandée
par l’époux ignorant dans le
délai d’un an
à partir du jour
où celui-ci aura pris connaissance de
l’état de transsexuel de son conjoint.
Cette procédure, dont les effets sont les
mêmes que ceux du divorce, offre cependant
l’avantage
d’éviter au demandeur
l’année de
séparation
généralement
exigée avant
l’introduction de la demande en
divorce4[0].
Pas plus
qu’elle
n’évoque son devoir de
sincérité au
moment du mariage, la loi allemande n’envisage
le désir
d’enfant du transsexuel ayant obtenu la
modification du sexe sur l’acte de naissance.
Pour répondre
à ce désir,
l’adoption et la
procréation artificielle sont les deux
techniques qui peuvent être
utilisées4[1].
Si les droits et devoirs du transsexuel
sont fixés en fonction de son nouveau sexe, la
décision de changement
d’état, en revanche,
n’a pas
d’effet
rétroactif. Elle ne modifie le lien juridique
de
l’intéressé
ni avec ses parents, ni avec ses enfants, ni avec les descendants de ceux-ci
(§ 11 TSG). Une remarque doit
être faite à
propos de
l’autorité
parentale du transsexuel sur les enfants
qu’éventuellement il a pu engendrer
avant son changement de sexe. Jusqu’à la
réforme du droit de
l’enfant
entrée en vigueur le 1er juillet
19984[2],
la dévolution de
l’autorité
parentale en cas de transsexualisme d’un des
deux parents donnait prise à bien des
critiques. Après divorce, depuis une loi du 18
juillet
19794[3],
l’autorité
parentale ne pouvait être
attribuée
qu’à
l’un ou
l’autre des
ex-époux ;
malgré une
décision de la Cour constitutionnelle
fédérale qui
avait proclamé
l’inconstitutionnalité
de la disposition interdisant toute autorité
parentale conjointe après
divorce4[4],
seul un très faible pourcentage de couples
exerçait celle-ci. En
conséquence, lorsque
l’un des parents,
forcément
divorcé, avait
changé de sexe,
l’autorité
parentale était pratiquement toujours
conférée par
le juge à
l’autre au nom de
l’intérêt
de l’enfant. Les nouvelles dispositions du 16
décembre
19974[5],
faisant de
l’autorité
parentale conjointe le principe en cas de divorce, permettent de
résoudre enfin de
manière satisfaisante la question. Si les deux
parents sont d’accord et ne
présentent pas au tribunal de la famille une
demande aux fins d’obtenir
l’autorité
parentale
séparée,
l’autorité
conjointe
demeure4[6].
Pas plus
qu’elle ne modifie le lien juridique du
transsexuel avec ses enfants, la décision de
changement d’état ne remet en cause les
droits acquis en matière de pension ou de
rente, mais elle
n’entraîne pas
non plus, en faveur du transsexuel, la
création de droits nouveaux
(§ 12, al. 1 TSG). Ainsi sera-t-il impossible
à un transsexuel homme/femme
d’obtenir une
pré-retraite plus
tôt que son sexe initial ne le
prévoit. S’il
doit être aussi bien
traité que tout autre citoyen, le transsexuel
n’a pas à
tirer avantage de son changement juridique de
sexe4[7].
Sur certains effets non
prévus par la loi concernant la modification
de la mention du sexe à
l’état civil, la jurisprudence a parfois
été
appelée à se
prononcer. C’est ainsi, entre autres, que la
Cour
fédérale de
justice a
décidé en
19954[8]
que les transsexuels femme/homme, après leur
changement juridique de sexe, ne devaient plus payer aux caisses que le montant
de la cotisation masculine. En revanche, les transsexuels homme/femme doivent,
dès la modification de la mention du sexe
à
l’état civil, verser
à ces mêmes
caisses le supplément
féminin4[9].
On observera enfin
qu’un droit de repentir est
réservé au
transsexuel qui a obtenu son changement juridique de sexe
(§ 9, al. 3 TSG). Pour exercer ce droit et
obtenir l’annulation de la
décision ayant
modifié juridiquement son sexe et ses
prénoms, aucune condition autre que le
sentiment nouveau d’appartenir
à son sexe initial
n’est exigée.
C’est sur la base
d’un rapport
suédois
inédit ayant
révélé
la volonté, exceptionnelle, chez certains
transsexuels de revenir en arrière, que le
législateur allemand a
réservé
cette possibilité. Mais
à notre connaissance, entre 1981 et 1990 tout
au moins, un seul transsexuel a fait usage, en Allemagne, de
celle-ci5[0].
Quoi qu’il en soit, la prudence du
législateur,
même si elle
apparaît en
l’occurrence quelque peu excessive, doit
être
assurément
saluée.
De nature
à réparer
quelque peu «
l’épouvantable erreur
» que la nature
paraît avoir commise
à
l’égard du transsexuel, la formule dite
« lourde » donne
des résultats satisfaisants outre-Rhin. A la
différence
d’autres
systèmes
Ä
notamment celui retenu en France par
l’Assemblée
plénière de
la Cour de cassation le 11 décembre
19925[1]
Ä les
exigences posées par le
législateur allemand
à la
consécration du changement de sexe sont
suffisamment précises pour lever toute
ambiguïté5[2]
! Quant aux conséquences juridiques de ce
changement, tant en matière de mariage que de
filiation, elles apparaissent légitimes et
équitables aussi bien pour
l’intéressé
que pour ses proches et pour la
société5[3].
Si ces
conséquences, incontestablement,
représentent pour les transsexuels la
normalisation à laquelle ils aspirent,
certains de ceux-ci n’obtiendront pas le
changement juridique de sexe. C’est un
mérite
supplémentaire du droit allemand que de ne pas
avoir oublié ces individus qui
s’identifient aussi au sexe
opposé, en leur offrant une solution de
rechange susceptible de leur apporter une aide substantielle.
B - La
« formule
légère
» ou la modification des
prénoms
Contrairement
à plusieurs
législations existantes qui ignorent la
possibilité de modification des
prénoms lorsque les conditions de changement
de sexe ne sont pas
réunies5[4],
la loi allemande admet une telle procédure.
Les buts poursuivis par le législateur sont
clairs, et les dispositions prévues sans
aucune équivoque. Mais si le
système comporte des avantages
indéniables, il engendre certains dangers
fréquemment
dénoncés.
1) Une formule moins ambitieuse au
service d’objectifs
clairs
L’idée-phare
des rédacteurs du texte est
généreuse.
Il est indispensable de venir au secours de tous les individus qui
s’identifient au sexe
opposé, quels que soient leur
état matrimonial et les traitements
médicaux ou chirurgicaux subis. Mais il
apparaît
déraisonnable
d’ouvrir la
possibilité
d’un changement juridique de sexe
à toute personne
éprouvant une
« conviction transsexuelle
» si celle-ci est encore dans les liens du
mariage, capable de procréer ou si elle
n’a aucunement
l’apparence du sexe
désiré5[5].
C’est pourquoi, dans de telles
hypothèses, une sorte de
« diminutif »
à la « formule
lourde » doit
être prévue,
qui n’entraîne
pas le changement d’état mais simplement
la modification des prénoms
(§1 à 7
TSG).
Les conditions
posées à
cette seconde formule sont bien évidemment
moins strictes que celles exigées pour le
changement juridique de sexe. A l’image du
demandeur au changement
d’état5[6],
l’intéressé
doit avoir la certitude constante, absolue et
irréversible de faire partie du sexe
opposé et, depuis au moins trois ans,
s’appliquer dans sa vie
à traduire cette certitude
(§ 1, al. 1 TSG). Mais,
à l’exception
encore de conditions communes en matière de
nationalité, les similitudes
s’arrêtent
là. La «
formule
légère
» n’implique
aucune adaptation chirurgicale ou médicale au
sexe opposé. Elle
n’implique pas non plus que le demandeur soit
célibataire au moment de la demande, ni
qu’il soit
stérile.
L’existence
d’un âge
minimum fixé
à vingt-cinq ans dans la loi appelle quelques
observations. Le projet initial, prévoyant
l’obligation pour le demandeur au changement de
sexe d’avoir au moins vingt-cinq ans, avait
très judicieusement
fixé à dix
huit ans l’âge minimum requis pour
demander la modification des prénoms. Mais en
raison de
l’hostilité
de certains parlementaires à cette
procédure, les
rédacteurs du texte furent contraints, dans
les deux solutions proposées, de retenir
l’âge minimum de vingt-cinq ans ; de ce
fait, la « formule
légère
» ne remplissait plus, dans la loi de 1980, les
buts qui lui avaient
été
assignés. Au-dessous de vingt-cinq ans, aucune
aide juridique n’était plus offerte au
transsexuel qui éprouvait depuis de longues
années le sentiment
d’appartenir
à l’autre
sexe et s’était
peut-être
déjà soumis
à des traitements lui ayant
donné
l’apparence de ce sexe. Par ailleurs,
s’est vue ainsi
privée de tout effet
l’idée
très louable des auteurs du projet de
concevoir la modification des prénoms,
facilement réversible, comme une sorte de
premier pas, de phase préliminaire au
changement juridique de sexe, envisageable seulement
à partir de vingt-cinq ans. Il a
déjà
été dit que
la Cour constitutionnelle
fédérale
avait, dès
19825[7],
jugé cette limite
d’âge inconstitutionnelle dans la
« formule lourde
». Depuis une
décision de cette
même Cour rendue le 26 janvier
19935[8],
une solution semblable a
été retenue
pour les transsexuels demandeurs à la
modification des
prénoms5[9].
Nombreux sont encore ceux qui regrettent outre-Rhin, en
matière
d’âge minimum, le texte du projet
initial.
A
l’instar de la
« formule lourde
», la « formule
légère
» requiert des experts un rapport attestant chez
le demandeur la
réalité du
sentiment irréversible
d’appartenance
à l’autre
sexe (§ 4, al. 3 TSG). Une fois le rapport
obtenu, le tribunal doit modifier les prénoms
du demandeur. Ces prénoms, dont la
neutralité
n’est pas
exigée, ont
été
indiqués par le transsexuel
lui-même dans sa demande
(§ 1, al. 2 TSG). On observera la
possibilité
Ä
logique dans la mesure où elle existe dans
l’hypothèse
de changement de sexe
Ä
d’un retour en
arrière pour
l’intéressé.
Ce dernier, s’il se sent tout
à coup en harmonie avec son sexe
chromosomique, peut demander l’annulation de la
décision ayant
modifié ses
prénoms. Il reprendra alors les
prénoms qui
étaient les siens auparavant
(§ 6, al. 1 et 2 TSG). Certes, rares sont les
hypothèses de
désir de retour en
arrière ; en
l’occurrence, elles existent
cependant6[0]
et il est bon qu’elles soient
prévues par la loi.
Un certain nombre
d’événements,
par ailleurs, rendront caduque la décision de
modification des prénoms du transsexuel. Il en
est ainsi tout d’abord si celui-ci engendre un
enfant, légitime ou naturel, plus de 302
jours6[1]
après que la
décision a acquis force de chose
jugée (§ 7,
al. 1, n 1 TSG). Pour le
législateur, cette conception
après changement de
prénoms marque une rupture dans la vie du
transsexuel qui traduit ainsi la perte de son sentiment
d’appartenance au sexe
opposé à
celui qui lui a
été
attribué lors de sa naissance. On notera au
passage, à nouveau, la prudence
extrême du
législateur qui
prévoit deux exceptions
à cette disposition. En effet,
s’il
s’avère que
l’enfant n’est
pas biologiquement celui de
l’intéressé,
ou lorsque des faits particulièrement
sérieux permettent de supposer que, bien
qu’il ait
conçu un enfant
après son changement de
prénoms, le transsexuel se sent toujours
appartenir au sexe opposé, il lui est permis
de reprendre les prénoms qui lui avaient
été
attribués par la
décision (§ 7,
al. 3 TSG).
La
décision de changement de
prénoms devient
également caduque lorsque le transsexuel se
marie (§ 7, al. 1,
n 3 TSG). Cette
règle
représente incontestablement
l’un des points les plus
controversés des dispositions
prévoyant la
possibilité
d’un tel
changement6[2].
Néanmoins,
l’existence de la
« formule
légère
», marque
particulière de
compréhension
à
l’égard de certains transsexuels,
comporte bien des avantages.
2) Les avantages et les risques de ce
« diminutif
» au changement de
sexe
Si le
système unitaire,
assurément, a le
mérite de la
clarté et de la
simplicité, il est dans
l’incapacité
de porter secours à ceux qui
s’identifient au sexe
opposé mais qui, ne remplissant pas les
conditions exigées pour une mutation juridique
de leur sexe initial, n’auront parfois pour
seul remède que le suicide. En Allemagne, la
« formule lourde
» demeure
fermée tout
d’abord, rappelons-le, aux individus
liés par le mariage. Certes, le mariage peut
généralement
être assez rapidement dissous en droit
allemand6[3],
mais certains transsexuels mariés repoussent
parfois
l’idée de
rompre leur lien
matrimonial6[4].
L’obligation pour le candidat au changement de
sexe d’être
célibataire
n’ayant jamais
été
discutée, la «
formule
légère
» apporte au transsexuel
marié, à
défaut d’une
solution totalement appropriée, tout au moins
un certain réconfort.
Par ailleurs, bien que souffrant
d’un trouble
irréversible de
l’identité
sexuelle, tous les sujets aptes à la
procréation ou
n’ayant pas subi les transformations
nécessaires pour prendre tout
à fait
l’aspect du sexe
opposé ne seraient pas secourus en
l’absence de la
dualité de
procédures. Or si les actes
médicaux conduisant
à la
stérilité
sont sans danger, il est loin d’en
être de même
pour les opérations de conversion sexuelle ;
bien des patients potentiels,
âgés ou
malades, sont obligés de renoncer
à celles-ci en raison des risques excessifs
qu’ils encourraient en
s’y
soumettant6[5].
Les résultats de ces interventions diverses
sont, par ailleurs, nettement moins satisfaisants chez les transsexuels
féminins que chez les transsexuels masculins.
Aussi certains transsexuels féminins
hésitent-ils
à faire le «
grand saut » et viendront finalement
élargir le groupe de ceux auxquels les
opérations sont interdites ou fortement
déconseillées6[6].
En l’absence
d’une formule plus
légère
offerte à ceux-ci, il est probable que les
sujets les plus perturbés se verraient
poussés vers des
opérations
qu’ils ont pourtant la sagesse de ne pas
souhaiter véritablement.
Solution moyenne apte
à doter les transsexuels
d’un régime
approprié à
leur situation personnelle, la « formule
légère
» permet de sortir de
« l’alternative
paralysante du tout ou
rien6[7]
». A partir du moment
où la
décision prend
autorité de chose
jugée, des droits non
négligeables vont en effet se voir
conférés
à
l’intéressé.
Celui-ci, tout d’abord, peut exiger des tiers
l’emploi de ses nouveaux
prénoms. Dans un certain nombre de cas
très précis,
la jurisprudence a
été
appelée à se
prononcer sur ce point. Elle a jugé, entre
autres, que les administrations diverses
étaient dans
l’obligation de
s’adresser au transsexuel dans la forme
correspondant au sexe sous-entendu par ces
prénoms6[8].
Il convient, à ce propos,
d’évoquer une
décision
récente de la Cour constitutionnelle
fédérale6[9].
Le demandeur
Ä ou
plutôt la demanderesse
Ä
était un transsexuel homme/femme
condamné à
la prison à
perpétuité.
Incarcéré
dans un établissement
carcéral masculin puisque le changement de
sexe n’avait pas eu lieu,
l’intéressé
qui avait simplement fait usage de la « formule
légère
» exigeait
d’être
appelé «
Madame ». Au nom du droit au respect de la vie
privée et plus
précisément
de
l’intimité,
la Cour lui donna satisfaction. Les commentateurs ont
apprécié,
outre-Rhin, le fait que dès le changement de
prénoms, le transsexuel ait ainsi la
possibilité
d’expérimenter
la vie du sexe auquel il aspire ; en
l’occurrence cependant, quelques doutes ont
été
émis sur le
bien-fondé de cette
décision7[0].
Si les administrations sont
désormais tenues
d’utiliser oralement les nouveaux
prénoms du transsexuel, elles doivent
également indiquer ceux-ci dans les registres
divers. Seuls, les registres dans lesquels figurent les naissances des propres
enfants du transsexuel ou de ceux qu’il a pu
adopter avant la décision judiciaire font
exception (§ 5, al. 3 TSG).
Dans le domaine du droit du travail, la
jurisprudence a également pris
très nettement position. Depuis un
arrêt de la Cour
fédérale du
travail7[1],
le transsexuel ayant obtenu la modification de ses
prénoms et pris
l’apparence du sexe
opposé n’a
pas à divulguer son
véritable sexe lors
d’un entretien
d’embauche.
L’employeur ne dispose
d’aucun droit, par la suite,
à résilier
pour
dol7[2]
le contrat conclu dans l’ignorance. Seule, la
résiliation pour erreur sur les
qualités substantielles de la personne,
prévue au §
119 BGB pourrait être prise en
considération dans
l’hypothèse
où le sexe de
l’intéressé
serait, pour la fonction occupée,
d’une importance toute
particulière.
Par ailleurs, par une jurisprudence
unanime qui fait toujours valoir la
nécessité de
ne pas porter à la connaissance des tiers des
éléments
relevant de la vie privée,
l’employeur se voit contraint de renouveler les
certificats de travail du transsexuel ayant fait usage de la
« formule
légère
». Sur ceux-ci figureront les
prénoms que
l’intéressé
est autorisé
à porter depuis la
décision
entérinant sa
demande7[3].
Les problèmes relatifs au service militaire,
enfin, paraissent être
désormais
résolus. Il est
évident que le transsexuel homme/femme,
à la caserne, sera en butte tant aux
plaisanteries douteuses de ses camarades qu’aux
mesures discriminatoires de ses supérieurs.
Depuis le témoignage
d’un transsexuel ayant
relaté sa dramatique
expérience de jeune
appelé et sa tentative de suicide, tous les
transsexuels sont aujourd’hui automatiquement
considérés
comme non aptes au service
militaire7[4].
Voilà,
on en conviendra, quelques mesures qui permettront au transsexuel de vivre mieux
dans sa nouvelle identité sexuelle et
faciliteront l’exercice de sa vie quotidienne.
Ainsi, même si le changement de
prénoms n’est
pas la panacée du
syndrôme transsexuel, il
entraîne
néanmoins pour les
intéressés
qui ne peuvent changer juridiquement de sexe des rapports moins
problématiques avec les tiers et, partant, une
intégration sociale plus
aisée.
Un
bémol,
néanmoins, doit
être apporté
à cette
appréciation
désormais
peut-être trop positive. En effet, si la
possibilité de modification des
prénoms a sans doute
considérablement
facilité, au lendemain de la loi, les
conditions de vie de certains transsexuels, les avantages
d’une telle solution doivent
être
considérés
de manière beaucoup plus
nuancée depuis la multiplication des documents
officiels faisant mention du sexe. Si, en Allemagne, la carte
d’identité,
le permis de conduire, la carte
d’électeur ne signalent toujours pas le
sexe, en revanche le fameux passeport communautaire
l’indique, de
même que
l’acte de naissance et divers documents
utilisés dans le cadre des assurances et des
retraites. C’est la mention du sexe dans ces
derniers documents qui, assurément, implique
pour le transsexuel les
désagréments
les plus manifestes : en effet, ne serait-ce que pour obtenir
n’importe quel emploi, ces papiers devront
être
présentés
à
l’employeur, et
l’intégration
sociale du transsexuel se verra par
là-même
menacée. Sans doute convient-il de mentionner
certains efforts qui, récemment, ont
été faits
pour remédier
à quelques uns de ces
désagréments.
C’est ainsi
qu’il est possible, pour voyager dans les pays
qui ne se contentent pas de la carte
d’identité,
d’obtenir un passeport allemand provisoire sans
indication de sexe, valable normalement cinq ans pour les transsexuels ayant
changé de
prénoms7[5].
Certains assureurs, par ailleurs, se sont
engagés à
conférer aux transsexuels un nouveau
numéro qui corresponde au sexe des
prénoms
modifiés7[6].
Mais, notons-le,
même avant que les documents mentionnant le
sexe se multiplient, la « formule
légère
» n’avait pas
fait
l’unanimité
malgré les avantages indiscutables
qu’elle engendre pour certains. Cette
procédure fut
d’abord vivement
critiquée,
dès son
élaboration, par de nombreux membres du
Bundesrat, hostiles au principe même de
la conception dualiste et tout
particulièrement
opposés à ce
que la « formule
légère
» soit offerte au transsexuel
marié. Pour eux,
à partir du moment
où les
prénoms d’un
époux avaient
été
modifiés, le risque
était grand
d’assimiler le couple
marié à un
couple d’homosexuels, surtout si
l’intéressé
avait été
opéré et
avait acquis une apparence identique à celle
de son
conjoint7[7].
Par ailleurs, le fait que la
décision de changement de
prénoms devienne caduque si le transsexuel se
marie7[8]
donna prise également
à de vives controverses. Cette disposition, il
est vrai, représente incontestablement
l’un des points discutables de la loi de 1980.
En effet, pourquoi le mariage du transsexuel rend-il caduque la
décision
l’ayant
autorisé à
changer de prénoms alors que la dissolution de
ce mariage n’est nullement une condition de la
demande ? Autrement dit, pourquoi le
législateur allemand traite-t-il
différemment le mariage existant au moment de
la demande et le mariage parfois souhaité,
ultérieurement, par le
demandeur7[9]
? Si l’on admet, comme le fait le
législateur, que deux individus puissent
demeurer liés par un lien conjugal
même lorsque
l’un d’entre
eux a changé de
prénoms et subi
peut-être
déjà des
opérations de conversion sexuelle, force est
de reconnaître que
l’annulation automatique du jugement autorisant
la modification des prénoms en cas de mariage
manque singulièrement de logique
!
Mais
c’est sans doute le risque de
dérapage du
système qui, lors de la
rédaction du projet, fut le plus souvent
dénoncé.
L’existence
d’une « formule
légère
», moins exigeante dans ses conditions,
n’allait-elle pas pousser des individus qui
n’étaient pas de vrais transsexuels mais
des travestis ou des malades mentaux dans une aventure dangereuse qui devait
leur être
fermée ? Plus largement, on reprochait
à la
procédure qui permettait aux
intéressés
d’opter seulement pour un changement de
prénoms, de sous-entendre
l’existence de deux groupes de transsexuels :
ceux qui cherchent par tous les moyens à
prendre l’apparence la plus parfaite de
l’autre sexe, et ceux qui se satisfont
d’un changement de
prénoms. Or le transsexuel authentique est
unique ; l’individu qui se contente
d’un changement de
prénoms n’est
pas un « vrai »
transsexuel, et son cas n’a pas
à être pris
en considération par une loi sur le
transsexualisme8[0].
Si aucune
réponse satisfaisante ne peut
être opposée
à ce dernier argument, le recul est suffisant
depuis la mise en vigueur du texte pour calmer les craintes de ceux qui
redoutaient une multiplication des changements de
prénoms. Selon une
enquête
réalisée
officiellement en 1990 et d’autres
enquêtes statistiques plus
récentes mais
inédites, les chiffres demeurent
d’une constance
étonnante depuis 1981 (tout au moins
jusqu’à la
réunification des deux Allemagnes) : environ
quatre-vingts changements juridiques de sexe par an contre soixante-dix
changements de
prénoms8[1].
Conclusion
Au-delà
du fait que le législateur allemand a
parfaitement su éviter, contrairement au
législateur italien, tout
« effet inflationniste
», tout effet de contagion dans
l’une comme dans
l’autre des formules
proposées, le
système retenu
présente, dans son ensemble, des
qualités incontestables.
Par la
dualité des
procédures
proposées, la
législation
adoptée en 1980 propose aux
intéressés
une solution qui se veut appropriée
à leur situation personnelle.
Grâce à sa
précision, tant dans les conditions du
changement juridique de sexe que dans les effets
opérés par
celui-ci, la formule dite « lourde
» écarte les
risques d’abus, de
dérapage
redoutés à
juste titre dans des législations plus floues.
Par l’effet de la
procédure originale du
« Vorabentscheidung
», la loi a le
mérite aussi de rassurer les transsexuels qui,
en connaissance de cause, peuvent alors
décider de leur destin. A la fois audacieux et
prudent, le système allemand tire enfin, de
manière
précise, les
conséquences de la modification de la mention
du sexe du point de vue du mariage, du
démariage et de la filiation.
Certains points,
assurément, suscitent la critique. On regrette
outre-Rhin, entre autres, l’absence actuelle de
toute condition d’âge minimum pour
obtenir le changement juridique de sexe, de
même que la
durée excessive des deux
procédures offertes aux
transsexuels8[2].
On reproche également au texte de 1980
certains silences, notamment à propos de la
prise en charge par les caisses
d’assurance-maladie des
opérations de conversion sexuelle. On
déplore souvent, en outre, dans le cadre de la
« formule
légère
»,
l’impossibilité
pour le transsexuel d’épouser aussi bien
une personne de son sexe qu’une personne de
sexe opposé au sien sans perdre le
bénéfice de
la décision modifiant ses
prénoms. Une telle interdiction
n’est guère
conforme à
l’article 12 de la Convention
européenne des droits de
l’Homme qui garantit la
liberté du mariage, et
l’on peut
s’étonner
qu’aucun
intéressé,
à notre connaissance,
n’ait tenté
jusqu’à ce jour de faire valoir cet
argument.
Pour
l’essentiel cependant, empreinte de
générosité
mais également de
réalisme, la loi allemande sur le
transsexualisme est une bonne loi, et les
compléments qui lui ont
été
apportés par la jurisprudence satisfont dans
l’ensemble les
intéressés
et les tiers.
Gardons-nous cependant
d’un excès
d’optimisme !
Malgré ses efforts
méritoires, le
législateur allemand
n’a pas encore eu raison des pesanteurs
sociales. Même si les
enquêtes
d’opinion ont
montré dès
1980 qu’une
majorité des citoyens allemands
était favorable
à la prise en compte du syndrome transsexuel,
nombreux sont ceux qui expriment encore leur
défaveur à
l’égard des personnes convaincues
d’appartenir au sexe
opposé et
décidées
à vivre cette conviction. Il y a peu de temps,
le maire d’une petite commune du Land de
Saxe, très
apprécié
depuis six ans de ses électeurs,
s’est vu
démis de ses fonctions suite
à une
procédure exceptionnelle. Il venait de
révéler
publiquement son état de transsexuel et sa
préparation au
« grand saut »,
dans l’espoir de changer de
sexe8[3]....
Françoise FURKEL
[*] Principales
abréviations allemandes :
BAG = Bundesarbeitsgericht / Cour
fédérale du
travail ; BayObLG = Bayerisches Oberstes Landesgericht / Tribunal
régional
suprême de
Bavière ; BGB =
Bürgerliches Gesetzbuch /
Code civil ; BGBl. = Bundesgesetzblatt / Journal officiel
fédéral ;
BGH = Bundesgerichtshof / Cour
fédérale de
justice ; BGHZ = Entscheidungen des Bundesgerichtshofes in Zivilsachen
(Bulletin des décisions de la Cour
fédérale de
justice en matière civile) ; BSG =
Bundessozialgericht / Cour
fédérale
sociale ; BT-Drucks = Bundestags-Drucksache (Doc. parlem. du Bundestag) ;
BVerfG = Bundesverfassungsgericht / Cour constitutionnelle
fédérale ;
BVerfGE = Entscheidungen des Bundesverfassungsgerichts
(Décisions de la Cour constitutionnelle
fédérale) ;
FamRZ = Zeitschrift für das
gesamte Familienrecht (périodique) ; LAG =
Landesarbeitgericht / Tribunal régional
du travail ; NJW = Neue Juristische Wochenschrift
(périodique) ; OLG =
Oberlandesgericht / Tribunal régional
supérieur ; R & P = Recht und
Psychiatrie (périodique) ; RuP = Recht
und Praxis (périodique) ; StAZ = Das
Standesamt (périodique) ; VersR =
Versicherungsrecht
(périodique).
[1] S.
HIRSCHAUER, « Hermaphroditen, Homosexuelle
und Geschlechtswechsler -
Transsexualität als historisches
Projekt », in
Geschlechtsumwandlung, Abhandlungen zur
Transsexualität, sous la dir.
de F. PFÄFFLIN et A. JUNGE,
éd. Schattauer, Stuttgart, 1992, p. 76 et s. ;
adde, le compte-rendu paru à la RID
comp. 1993, p. 726.
[2] Peu
importe, notons-le, que le comportement du transsexuel ne soit que
l’expression du libre arbitre ou
qu’il ait une origine organique comme de
récentes
études permettent de le penser
(« Le Monde », 4
nov. 1995, p.19 ; V. aussi V. SIGUSCH, Geschlechtswechsel, Kleinverlag,
Hambourg, 1992, p. 78 et s).
[3] V.
infra, p. 5.
[4] Ce
terme « Geschlechtsumwandlung
»,
très
évocateur, a
été
employé par M.
PFÄFFLIN dans son ouvrage sur le
transsexualisme, Geschlechtsumwandlung, Abhandlungen zur
Transsexualität,
préc.
[5] Mais
après la
Suède qui,
dès 1972, avait
adopté une loi en
matière de transsexualisme (loi du 21 avr.
1972, Schwedische Gesetzessammlung 1972:119).
[6] Gesetz
über die
Änderung der Vornamen und die
Feststellung der
Geschlechtszugehörigkeit in
besonderen Fällen -
Transsexuellengesetz (BGBl. 1980, I, 1654). Cette loi est
entrée en vigueur le 1er janv.
1981.
[7] Sur
cette influence constante, plus
particulièrement en droit de la famille, V. G.
REINHART, « Le
développement du droit
matrimonial et du droit de la famille en Allemagne sous
l’influence de la Loi
fondamentale »,
Mélanges offerts
à A. COLOMER, Litec, Paris, 1993, p. 371 et
s.
[8] Sur le
nouveau droit de l’enfance en vigueur depuis le
1er janv. 1998, F. FURKEL, « Le
nouveau droit de l’enfance en
République
fédérale
d’Allemagne
», RTD civ. 1998, p. 805 et
s.
[9] Il
est fréquent, en effet,
qu’il le soit. Ainsi, en
matière de filiation, dans ses
arrêts du 31 janv. 1989 (BVerfGE 79,56) et du
26 avr. 1994 (BVerfGE 90,263), la Cour constitutionnelle
fédérale
avait intimé
l’ordre au
législateur de
procéder à
un certain nombre de réformes avant la fin de
la législature ouverte
à l’automne
1994.
[10] M.
S. AUGSTEIN, « Entscheidungen zur
Transsexualität und
Intersexualität bis zum 31.12.1980
», StAZ 1982, 241.
[11] Nous
entendrons désormais par
l’expression «
changement d’état
» le changement juridique de sexe et non le
changement de prénoms.
[12] Entre
autres, OLG Francfort, 8 déc. 1965, NJW 1966,
407 ; OLG Francfort, 14 févr. 1969, NJW 1969,
1575 ; BGH, 21 sept. 1971, StAZ 1972, 137.
[13] BGH,
21 sept. 1971, BGHZ 57, 63.
[14] Au
nom de ces deux droits devait être exclue toute
possibilité de contraindre un individu
à mener une existence dans le cadre
d’un sexe qui
n’était plus, ni psychologiquement, ni
morphologiquement, le sien.
[15] BVerfG,
11 oct. 1978, BVerfGE 49, 286.
[16] V.
infra, p. 6.
[17] Rapport
de la Commission adopté le 1er mars
1979 ; V. Aff. VAN OOSTERWIJCK c/Etat belge,
Série A,
n 40,
n 52.
[18] On
notera, en outre, qu’au moment du
procès VAN OOSTERWIJCK
très
médiatisé
outre-Rhin, une requête similaire
déjà
ancienne opposant une ressortissante allemande
à la RFA
était
également soumise
à la Commission
(Requête
n 6699/4, X ... c/ R.F.A.
; D. 6699/74).
[19] BT -
Drucks 8/2947, p. 11.
[20] BVerfG,
16 mars 1982, BVerfGE 60, 123. Sur la motivation de cet
arrêt, V. StAZ 1982, 170.
[21] Entre
autres, F. PFÄFFLIN,
«
Fünf Jahre Transsexuellengesetz
- Eine Zwischenbilanz », StAZ 1986,
201.
[22] Le
changement juridique de sexe impliquant en effet des mutilations
irréversibles et une inaptitude
définitive à
la procréation.
[23] V.
R. WILLE, « Sexualmedizinische Anmerkungen
zum Transsexuellengesetz », FamRZ 1981, 419
; également W. EICHER,
« Sexualmedizin in der Praxis
», FISCHER, Stuttgart, 1980, p. 203. Plus
récemment,V. OLG
Zweibrücken, 7 mai 1993, RuP 1993, 108 et s. ;
V. aussi BayObLG Munich, 14 juin 1995, RuP 1995, 150 et s., obs. M. S.
AUGSTEIN.
[24] V.
supra, p. 4.
[25] BSG,
6 août 1987, NJW 1988, 1550 et
s.
[26] BGH,
8 mars 1995, inédit, dossier IV ZR 153/94 ; V.
aussi OLG Cologne, 11 avr. 1994, VersR 1995, 447 et s.
[27] BT -
Drucks 8/2947, p. 21.
[28] §
1565, al. 1 BGB.
[29] V.
supra, p. 4.
Sur ce jugement
intermédiaire, V. OLG Hamm, 15
févr. 1983, FamRZ 1983, 491 et s. ; V. aussi
G. SIESS, « Die
Änderung der
Geschlechtszugehörigkeit
», éd. Hartung
- Gorre, Constance, 1996, p. 147 et s.
[31] Préc.
[32] OLG
Hambourg, 8 avr. 1980, StAZ 1980, 244.
[33] Sur
ces décisions, M. S. AUGSTEIN,
« Entscheidungen zur
Transsexualität und
Intersexualität bis zum 31.12.1980
»,
préc.
[34] Préc.
[35] Cette
belle expression est empruntée
à Mme
Françoise FLIPO, sous Cass. civ.
1ère, 21
mai 1990, JCP 1990, 21588.
[36] Il a
paru souhaitable en effet de permettre au
législateur, notamment en ce qui concerne le
service militaire,
l’armée de
métier ou encore
l’internement
carcéral, de
prévoir certaines dispositions
dérogatoires applicables au transsexuel. Mais,
notons-le, on a toujours
considéré
que de telles dispositions devaient demeurer
très
limitées pour ne pas mettre obstacle
à
l’intégration
sociale de
l’intéressé.
[37] On
notera au demeurant que même avant la loi du 11
sept. 1980 sur le transsexualisme, la Cour
fédérale de
justice avait
déjà
conféré
explicitement au transsexuel ayant changé de
sexe le droit d’épouser une personne du
sexe opposé au sien
à
l’état civil,
précisant que ce droit
n’était pas contraire aux bonnes
mœurs. Plus
récemment, certaines juridictions saisies par
des homosexuels désirant contracter mariage
ont seulement
précisé
très logiquement que la loi de 1980 ne
modifiait en rien
l’interprétation
du concept de « mariage
», et ne permettait toujours pas en
conséquence ce genre
d’union ! (OLG Cologne, 15 mars 1993, NJW 1993,
1997 et s).
[38] Une
« loi portant
réorganisation du droit de la
formation du mariage », du 4 mai 1998
(Eheschließungsrechtsgesetz
Ä
Bundesgesetzblatt 1998, I, 833 et s.) remplace
l’ancienne
législation de 1946 (Ehegesetz) et se
trouve désormais
intégrée
dans le BGB. On notera qu’à la
différence du droit
français, le dol a toujours
été admis en
matière de mariage.
[39] W.
SCHLÜTER, BGB
Ä
Familienrecht, éd.
Müller, Heidelberg, 1998, p.
23.
[40] Cet
avantage est minime dans la mesure où, aux
termes du § 1565, al. 2 BGB, le divorce peut
être prononcé
avant que les époux soient
séparés
depuis un an dans la mesure où la continuation
du mariage représenterait pour le demandeur,
en raison de motifs tenant à la personne de
l’autre
époux, une
dureté à
laquelle on ne saurait le contraindre. Il est vraisemblable, en effet, que la
dissimulation par un époux de son
état de transsexuel serait
considérée
comme une telle dureté de nature
à conduire à
un divorce immédiat.
[41] D’après
la loi allemande sur l’adoption du 2 juil.
1976, l’adoptant peut
être soit un couple, soit une personne seule
(§ 1741, al. 2 BGB). A
côté
d’un contrôle
de légalité,
le tribunal des tutelles exerce un contrôle
d’opportunité,
l’adoption
n’étant
prononcée que
lorsqu’elle sert
l’intérêt
de l’enfant (§
1741, al. 1 BGB). Jusqu’à ce jour,
à notre connaissance, la jurisprudence
n’a pas eu à
se prononcer sur l’adoption par un couple dont
l’un a changé
juridiquement de sexe. Quant à la
procréation
médicalement
assistée avec donneur, elle
n’est pas
réglée par
la loi et ne semble pas non plus avoir donné
lieu à jurisprudence dans
l’hypothèse
d’un couple demandeur dont
l’un des membres est transsexuel. Mais
observons, en l’occurrence,
l’absence de prise en charge de la
procréation
médicalement
assistée par les caisses
d’assurance-maladie puisque seules, les
opérations dans lesquelles les
gamètes des deux membres du couple sont
utilisés, sont
remboursées.
[42] Das
Kindschaftsrechtsreformgesetz, 16 déc.
1997, BGBl. 1997,I, 2942 et s. (V. note 8).
[43] Loi
portant réglementation nouvelle du droit
applicable aux soins dispensés par les
parents, BGBl.1979,I, 1061 et s.
[44] BVerfG,
3 nov. 1982, BVerfGE 61,358.
[45] Préc.
M. S. AUGSTEIN,
« Zur Situation transsexueller Eltern
», interwiew, consultable :
www.vivats.de/Zeitung/99-1/artikel/augstein.html.
[47] Pour
plus de détails, V. G. SIESS,
« Die
Änderung der
Geschlechtszugehörigkeit
», op. cit., p. 264 et
s.
[48]
BGH, 8 mars 1995,
préc.
Dans
l’hypothèse
où un transsexuel homme/femme a subi toutes
les opérations de conversion sexuelle mais se
refuse à demander la modification de son sexe
à
l’état civil (parce
qu’il ne veut pas mettre fin
à son mariage par exemple), la caisse doit se
contenter de la cotisation exigée des
personnes de sexe masculin. Sur l’ensemble des
problèmes
rencontrés par le transsexuel en droit du
travail et en droit social, V. C. CORRELL, «
Im falschen Körper
Ä
Ein Beitrag zur rechtlichen und
tatsächlichen Problematik der
Transsexualität
», NJW 1999, 3372 et s.
[50] V.
l’enquête de
S. OSBURG et C. WEITZE, « Betrachtungen
über zehn Jahre
Transsexuellengesetz », R. & P. 1993,
102 et s.
L’excès de
prudence est rarement nuisible ! La presse allemande a
rapporté
récemment
l’exemple
très précis
d’un transsexuel iranien homme/femme qui,
très vite
après sa conversion sexuelle, tenait
à reprendre son ancien sexe
(SuddeutscheZeitung, 19 juin 2000). Il est vrai que ses motivations
n’avaient rien
à voir avec la conviction
qu’il avait toujours
d’appartenir au sexe
opposé ; mais ayant
vécu vingt-cinq ans sa condition
d’homme, il ne supportait pas, en Iran, sa
nouvelle condition de femme ...
[51] Cass.
ass. plén., 11
déc. 1992, JCP 1993, 21991. Sur ces deux
arrêts, V. obs. G.
MÉMETEAU, JCP 1993, 21991. On rappellera
qu’aux termes de ces
décisions, la modification
à
l’état civil du sexe du transsexuel est
autorisée, le principe du respect
dû à la vie
privée justifiant que
l’état civil de celui-ci indique
désormais le sexe dont il a
l’apparence. Mais les conditions
préalables à
la demande de modification de l’état
civil, si elles sont de nature à
éviter un trop grand laxisme ne sont pas
suffisantes pour clarifier totalement les
hypothèses de changement juridique de sexe. V.
également Rennes, 26 oct. 1998, D. 1999, 508 ;
dans cet arrêt, rappelons-le, les juges ont
accordé le changement de la mention du sexe
sur les registres de l’état civil
à un transsexuel
n’ayant pas subi
d’intervention chirurgicale modifiant son
identité sexuelle morphologique
!
[52] Une
réserve, cependant, doit
être faite à
propos des opérations de conversion sexuelle
qui auraient pu sans doute être
précisées
davantage.
Sur ces
conséquences, la loi allemande ne laisse
place, en outre, à aucune
équivoque ... au contraire des
décisions
françaises
précitées
rendues par
l’Assemblée
plénière (V.
note 51) qui ne règlent ni la question du
mariage contracté par le transsexuel avant la
modification de son état civil, ni celui
souhaité,
après modification !
[54] Notamment
la loi suédoise
(préc.) et les lois
néerlandaise (24 avr. 1985, Staatsblad
1985, 243) et italienne (14 avr. 1982, Gazzetta Ufficiale, 19 avr. 1982,
n 106).
[55] Gesetzentwurf
der Bundesregierung, BT-Drucks 8/2947.
[56] V.
supra, p. 3 et s.
[57] V.
supra, note 20.
[58] BVerfG,
26 janv. 1993, FamRZ 1993, 657.
[59] Les
deux procédures peuvent donc
être
désormais
utilisées
dès la
majorité de
l’intéressé.
Pour certains, malgré
l’absence de toute jurisprudence sur ce point,
il serait même concevable
qu’un mineur, par
l’intermédiaire
de son représentant, fasse une demande de
changement de prénoms (V. G. SIESS, Die
Änderung der
Geschlechtszugehörigkeit, op.
cit., p. 127).
[60] Six
« retours en
arrière » ont
été
dénombrés
entre 1981 et 1990 (V. S. OSBURG et C. WEITZE, «
Betrachtungen über zehn Jahre
Transsexuellengesetz »,
préc., p. 102).
[61] ...
ou plus exactement 300 jours depuis la loi du 16
déc. 1997 portant
réforme du droit de
l’enfant (Das
Kindschaftsrechtsreformgesetz, préc.).
Cette loi, en effet, a enfin
réalisé
l’harmonisation avec les autres pays
européens de la
durée de la
période
légale de conception !
[62] V.
infra, p. 15.
[63] Il
suffit en effet d’apporter la preuve de
l’échec du mariage
(§ 1565, al. 1 BGB) ; le
législateur a
prévu, en outre, des
présomptions
d’échec, notamment lorsque les
époux vivent
séparés
depuis un an (§ 1566, al. 1 BGB ; V. aussi
§ 1566, al. 2 BGB).
[64] BT -
Drucks 8/2947, p. 25.
[65] BT -
Drucks 8/2947, p. 25.
[66] M.S.
AUGSTEIN, « Zum Transsexuellengesetz
», StAZ 1981, 10.
[67] Cette
expression, souvent reprise, est de Mme
Michèle GOBERT,
« Le transsexualisme ou de la
difficulté
d’exister »,
JCP 1990, 3475.
[68] OLG
Hamm, 15 févr. 1983, FamRZ 1983,
494.
[69] BVerfG,
15 août 1996, StAZ 1997, 270 et
s.
[70] Ch.
GEISLER, obs. sous arrêt
préc., StAZ 1997, 272.
[71] BAG,
21 févr. 1991, FamRZ 1991, 1046 et
s.
[72] Suivant
le § 123 BGB.
[73] V.
l’une des
dernières
décisions en ce sens, LAG Hamm, 17
déc. 1998, NJW 1999, 3435 et
s.
[74] M.
S. AUGSTEIN, « Zur rechtlichen Situation
Transsexueller in der Bundesrepublik Deutschland
», in Geschlechtsumwandlung, Abhandlungen
zur Transsexualität, sous la
dir. de F. PFÄFFLIN et A. JUNGE, op.
cit., p. 110.
[75] M.
S. AUGSTEIN, « Neues zur Rechtslage von
Transsexuellen », consultable :
www.transidentitas.org/jus/augstein.htm,
p. 2.
[76] M.
S. AUGSTEIN, « Neues zur Rechtslage von
Transsexuellen »,
préc., p. 3.
[77] BT -
Drucks 8/4120, p. 15.
[78] V.
supra, p. 12.
[79] M.
S. AUGSTEIN, “ Zum Transsexuellengesetz
”, op. cit., p. 12.
[80] V.,
entre autres, BT - Drucks 8/2947, p. 20.
[81] Selon
l’enquête
publiée (S. OSBURG et C. WEITZE,
« Betrachtungen
über zehn Jahre
Transsexuellengesetz », op. cit., p.
94 et s.), entre 1981 et 1990, 733 transsexuels ont obtenu la modification de
la mention de leur sexe à
l’état civil tandis que 683 ont obtenu
le changement de prénoms.
L’âge moyen de la demande est de 33 ans,
et les transsexuels homme/femme sont deux fois plus nombreux que les
transsexuels femme/homme. Ceux qui considèrent
le changement de prénoms comme une phase
préalable au changement de sexe attendent en
moyenne deux ans avant d’entamer la seconde
procédure. On ajoutera enfin
qu’environ 25 % des transsexuels ayant
changé de
prénoms se contentent de cette
« formule
légère
» qui leur est
proposée par la loi (pour davantage de
chiffres, V. l’étude
précitée ;
V. aussi M. R. WILL, « Symposium
über medizinische und rechtliche
Fragen der Transsexualität
», NJW 1996, 769).
[82] La
durée moyenne de la
procédure pour
l’obtention du changement de
prénoms est en effet comprise entre 18 et 24
mois. Elle est souvent supérieure
lorsqu’il
s’agit
d’obtenir la modification de la mention du
sexe.
[83] Saarbrücker
Zeitung, 30 nov. 1998, p. 13.
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